Admissions scolaires: les 5 familles triomphent
Le ministre de l’Éducation, R. J. Simpson, devra réévaluer six demandes d’admission aux écoles francophones du territoire suite à une récente décision de la Cour suprême des TNO. Le juge Paul Rouleau a donné gain de cause à la Commission scolaire francophone des TNO (CSFTNO) et à cinq familles non-ayants droit de Yellowknife et de Hay River dont les demandes d’admission avaient été refusées en 2019. L’une de ces familles en était à sa seconde révision judiciaire.
Écoutez l'entretien de Batiste Foisy, de l'émission Bonjour, là!, avec le directeur de la Comission scolaire francophone des TNO, Simon Cloutier.
Dans ce dernier jugement, le juge Rouleau a rejeté les principaux arguments mis de l’avant par l’ancienne ministre de l’Éducation – et actuelle Première ministre – Caroline Cochrane pour justifier le rejet de ces six demandes d’admission. « Ses conclusions reposent en grande partie sur des considérations illogiques ou non étayées par la preuve dont elle disposait », peut-on lire dans la décision.
Selon la règle qui était alors en place – qui a été abrogée en juin – les familles hors-critère pouvaient demander au ministre de l’Éducation d’exercer un pouvoir discrétionnaire pour accepter une admission d’exception.
« Considérations illogiques »
Pour justifier ses refus, le gouvernement plaidait que l’apport de familles non-ayants droit n’était pas nécessaire compte tenu de la vitalité relative de la communauté francophone. Selon la preuve présentée, les écoles francophones des TNO auraient accueilli un nombre croissant d’élèves.
Un argument « fondé sur des prémisses qui sont fausses ou discutable », selon le juge, qui a déterminé que « les chiffres considérés par la ministre ont été artificiellement surestimés pour les dernières années. » Le magistrat souligne notamment que l’augmentation des effectifs scolaires plaidé par le gouvernement était en bonne partie attribuable à la mise en place des prématernelles pour tous.
Le Palais de justice de Yellowknife a accueillie par le passé plusieurs familles de non-ayants droits désirant faire admettre leurs enfants dans une école francophone du territoire. (Crédit photo : Thomas Ethier)
Le gouvernement soutenait que l’admission des enfants entrainerait un cout élevé. Selon les calculs gouvernementaux, chaque élève du programme scolaire francophone couterait en moyenne 2 280 $ de plus par an que ceux des programmes majoritaire de Yellowknife et de Hay River. Selon l’argument du gouvernement, l’admission de ces six non-ayants droit pourrait avoir un effet d’entrainement sur les inscriptions futures et créer de l’imprévisibilité budgétaire.
Cet argument est également rejeté par le juge Rouleau, qui souligne que les demandes étudiée se distinguaient et ne laissaient pas entrevoir un bond soudain des inscriptions de non-ayants droit. « La crainte de la ministre de se voir contrainte à exercer sa discrétion dans les cas futurs a été grandement exagérée », tranche le juge.
Non-ayants droit
Les enfants concernés par ces demande de révisions sont considérés comme non-ayants droit, et ils n’entrent pas, non plus, dans l’une des trois catégories prévues dans la directive ministérielle sur les inscriptions.
Né au Canada de parents étrangers, l’un de ces enfants a appris le français à la garderie et maitrise aujourd’hui mieux cette langue que l’anglais. La demande d’admission de ses parents a été refusée à deux reprises par la ministre. Chacune de ces décisions ont été portées devant la Cour suprême des TNO en 2019 qui a exigé un nouvel examen. À nouveau, la demande avait été rejetée.
Deux autres élèves, trilingues, nés à l’étranger, qui entamaient leur 8e et 9e année, ont aussi vu leur admission refusée par la ministre. Ils ont chacun reçu le prix du meilleur élève dans leur cours de français d’un programme d’immersion de Yellowknife, et ont suivi des cours particuliers en français.
Les parents d’une autre élève sont bilingues. Ils occupent des professions dans lesquelles ils servent quotidiennement les Franco-Ténois dans leur langue et sont impliqués dans la communauté franco-ténoise. L’enfant a fréquenté la garderie francophone et parle couramment la langue.
Les deux autres requêtes concernent les enfants de deux familles migrantes allophones. Dans la première, l’enfant, dont le grand-père parlait français, a fréquenté une garderie francophone, mais les parents ne parlent pas la langue. Dans l’autre, l’admission a été faite sous la catégorie « nouvel arrivant », mais la demande a été rejetée, car l’enfant est né au Canada.
Une victoire symbolique
Si le président de la CSFTNO, Simon Cloutier, se réjouit de ce résultat, il ne feint pas non plus la surprise. « On ne se cachera pas que c’était la décision à laquelle on s’attendait, affirme-t-il d’emblée. On souhaite maintenant que le ministre de l’Éducation prenne, cette fois-ci, les bonnes décisions, et le plus tôt possible. Ces familles ont déjà dépensé beaucoup de temps et d’énergie et ont espéré que ça se conclut rapidement. »
Cette décision de la Cour suprême des TNO survient quelques semaines après le l’abrogation de la directive ministérielle en vertu de laquelle ces révisions étaient effectuées. Le ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation, R. J. Simpson a promis qu’un nouveau règlement serait en place pour la rentrée 2020.
Pour Simon Cloutier, cette récente décision de la Cour suprême des TNO pourrait peser dans la balance et influencer l’élaboration des nouvelles règles. « Le juge est venu confirmer ce qu’on affirme depuis des années, indique-t-il. Et même si on est en processus de création d’un nouveau règlement, ça ajoute du poids à nos arguments. On veut changer le règlement, et on veut travailler ensemble pour s’assurer que nous aurons quelque chose qui fonctionne pour les deux partis, pour éviter des situations comme celles qu’on a vécues dans les dernières années. »
Radio Taïga a sollicité les commentaires de la première ministre Caroline Cochrane, interpellée dans la décision, et ceux du ministre de l’Éducation de la Culture et de la Formation, R. J. Simpson. Au moment de mettre sous-presse un entretien avec l’une ou l’autre n’avait pu être confirmé.
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