Le Yukon réduit l’activité minière
Denis Lord
IJL- Réseau.Presse- L’Aquilon
Le gouvernement du Yukon ne prohibera pas le développement minier sur le territoire de la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun; il propose en contrepartie d’interdire de jalonner des claims sur les portions « culturellement ou environnementalement significatives » de son territoire où l’activité minière est inappropriée.
La proposition a été rendue publique le 5 août et est attribuée au premier ministre du Yukon, Ranj Pillai. Elle fait écho à des demandes de la cheffe de la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun (PNNCND), Dawna Hope, de cesser toutes les activités minières sur son territoire, consécutivement au déversement de matière contaminée survenu à la mine Eagle Gold le 24 juin dernier. Plus de deux millions de tonnes de minerai contenant du cyanure auraient quitté le remblai de l’infrastructure.
Conséquences économiques et légales
« La portée et la nature de la demande de la PNNCND […] ont des conséquences économiques et légales, explique M. Pillai. Les processus par lesquels les compagnies minières obtiennent la permission d’opérer au Yukon sont inscrits dans la législation fédérale et territoriale et sont ancrés dans l’Accord-cadre définitif entre le gouvernement du Canada, le Conseil des Indiens du Yukon et le gouvernement du Yukon. »
Le premier ministre a aussi évoqué les contraintes de la Loi sur les eaux et la Loi sur l’évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon; faire fi de ces législations aurait des conséquences considérables pour tous les Yukonais, fait valoir M. Pillai.
Enquête indépendante
Le gouvernement du Yukon a donc proposé à la PNNCND d’interdire le jalonnage de claims sur son territoire. Il s’est déjà entendu avec celle-ci pour arrêter durant deux mois les consultations sur de nouveaux permis miniers. Cette pause n’inclut cependant pas les décisions à prendre sur des consultations déjà menées auprès de Na-Cho Nyäk Dun. Un autre projet aurifère est en cours de révision.
Le gouvernement s’est également engagé à ne pas accorder de permis à une autre infrastructure de lixiviation en tas avant que les conclusions d’une commission d’enquête indépendante puissent être incluses dans les pratiques et les politiques.
Les membres de cette commission n’ont pas encore été nommés. « Nous travaillons encore avec la PNNCND de la logistique, écrit une porte-parole du gouvernement du Yukon, y compris pour déterminer qui ferait partie de cette commission d’enquête indépendante. »
« Nous espérons qu’une commission d’enquête serve les intérêts mutuels de nos deux gouvernements en découvrant les causes du bris [de l’infrastructure de lixiviation] et identifie les leçons à en tirer le plus tôt possible », déclare Ranj Pillai. Son gouvernement a mis en ligne un site consacré à informer le public sur la mine Eagle Gold et sur les travaux d’assainissement. Au moment d’écrire ce texte, une version française était en préparation.
Perte de confiance
De son côté, la Première Nation Na-Cho Nyäk Dun demande à ce que la gestion des travaux d’assainissement d’Eagle Gold soit retirée des mains de la compagnie qui la possède, Victoria Gold.
« La réalité est que Victoria Gold ne peut pas réparer les dommages causés par cet évènement », affirme la cheffe de Na-Cho Nyäk Dun, Dawna Hope. « Elle a échoué à mettre en œuvre les mesures correctrices demandées par le gouvernement du Yukon. Les excuses de Victoria Gold et les commentaires de son président-directeur général sonnent creux et faux. La compagnie a perdu notre confiance et nous ne croyons pas qu’elle soit capable de régler le désastre qu’elle a créé sur notre territoire traditionnel. »
Un concert intitulé Cyanide in the Water, A Concert to Ban Heap Leach (un concert pour interdire la lixiviation en tas) aura lieu à Carmacks le 24 aout, avec, notamment, Snotty Nose Rez Kids, Love and a .38.
Stockage et traitement
Victoria Gold affirme faire quotidiennement des échantillonnages d’eau dans son site miner. La majorité de ceux-ci n’ont montré aucune trace de cyanure. Dans sept cas, les proportions varieraient entre 5,2 et 9,3 parties par milliard de cyanure disponible alors que les recommandations pour la qualité de l’eau potable au Canada sont d’une quantité maximale de 200 parties par milliards. Cependant, le permis d’eau accordé pour Eagle Gold fait état d’une concentration maximale de cinq parties par milliard.
La compagnie est en train de compléter la construction d’un site supplémentaire de stockage d’eau sur place et a augmenté sa capacité de traitement de l’eau avec un système d’osmose inverse. Cependant, Victoria Gold a cessé de relâcher de l’eau le 2 aout, suite à la découverte de poissons morts dans le ruisseau Haggart, en aval du site minier. Aucun autre poisson mort n’a été observé depuis.
Des échantillons d’eau prélevés à Haggart et à Dublin Gulch indiquent, selon le gouvernement, des concentrations de cyanure qui dépassent les recommandations pour la vie aquatique.
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