Du bois pour échapper au mazout
Septembre dernier a eu le plus grand nombre de permis de récolte de bois aux TNO en six ans. À Yellowknife, la corde se vend à 500 $. « L’avantage de soutenir une industrie locale de récolte de bois, c’est que l’argent reste ici dans le Nord », commente Linda Todd, coordonnatrice de programme chez Arctic Energy Alliance.
C’est en septembre que le gouvernement territorial reçoit le plus de demandes de permis de coupe de bois. Depuis 2015, il en a délivré 1987. (Crédit photo : Cristiano Pereira)
Les thermomètres baissent, les premiers flocons de neige commencent à tomber et les maisons commencent à se chauffer un peu partout aux TNO. C’est le temps d’une certaine inquiétude quant aux futures factures de l’hiver. Le système de chauffage le plus répandu aux TNO est le mazout, qui n’est pas bon marché ; ces derniers jours, à Yellowknife, son prix est monté à 2,04 $/litre.
Le propane est aussi largement utilisé et, dans des endroits comme Inuvik, il y a même du gaz naturel. Le chauffage électrique n’est pas aussi courant qu’ailleurs au Canada, car il coûte cher. « Nous payons presque 31 cents par kilowatt/heure ; c’est beaucoup. Au sud, en Alberta, au Québec ou en Ontario, c’est entre six et dix cents, donc c’est assez différent », explique Linda Todd, coordonnatrice de programme chez Arctic Energy Alliance, un organisme qui a pour mandat « réduire les coûts et les répercussions environnementales des services énergétiques » aux TNO.
L’augmentation du prix du mazout va peut-être pousser plus de gens à rechercher du bois pour le feu. Aux TNO, toute personne qui récolte du bois de chauffage doit au préalable demander un permis – gratuit – au ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles.
Les données fournies par le gouvernement démontrent qu’en septembre dernier on a enregistré le plus grand nombre de demandes de récolte de bois de ces six dernières années. Quelque 270 permis ont été accordés ces dernières semaines : c’est le nombre le plus élevé depuis septembre 2016, au cours duquel on avait accordé un sommet de 292 permis de coupe. C’est considérablement plus que les demandes de septembre 2021, soit 205, et légèrement plus que les demandes du même mois en 2020, soit 261 demandes de permis.
En regardant les statistiques depuis 2015, il y a une conclusion facile à tirer. C’est durant le mois de septembre qu’on fait le plus de demandes de permis de coupe de bois, soit 1987 permis attribuées en sept ans. Ce phénomène s’explique notamment par le fait que c’est à ce moment que les gens se préparent pour le long hiver.
En deuxième place vient le mois d’octobre. Cette année, dans les 16 premiers jours du mois, 97 permis ont été demandés, presque autant qu’en août, soit 99 permis, ou qu’en mai, soit exactement 100 permis.
Les mois les moins sollicités sont généralement décembre, février et janvier, ce qui peut se justifier par le fait que les gens sont déjà approvisionnés et prêts pour l’hiver.
Le gouvernement des TNO a autorisé une coupe de 42 500 m3 au cours de l’exercice 2021-2022. (Crédit photo : Cristiano Pereira)
Depuis 2015, l’année avec le plus de demandes a été 2016, comptabilisant 1038 demandes.
Le ministère a aussi informé qu’au cours de l’exercice 2021-2022, une récolte totale de 42 500 m3 de bois a été autorisée aux TNO. Un permis commercial était actif, et son titulaire était autorisé à récolter environ 7 500 m3 de bois. Les 35 000 m3 restants ont été répartis entre des permis de coupe de bois gratuits pour l’usage personnel (26 240 m3) et des permis de coupe de bois pour des exploitations commerciales plus petites (8 633 m3).
Près de la moitié du volume autorisé à l’échelle du territoire se trouvait dans la région du Slave Nord (48 %), suivie du Slave Sud (39 %), du Dehcho (8 %), du Beaufort-Delta (4 %) et du Sahtu (2 %). La récolte de bois de chauffage représentait 85 % du volume autorisé, les grumes de sciage représentant 14 % supplémentaires. Le 1 % restant était destiné aux poteaux de clôture et à d’autres utilisations. Environ 75 % du volume total autorisé ciblait les arbres morts sur pied dans les endroits récemment incendiés.
500 $ la corde de bois
Il n’est pas facile de savoir si le bois de chauffage peut être une solution moins dispendieuse que le chauffage au mazout sur le long terme. Trouver une réponse à cette problématique s’avère complexe, car cela dépend de plusieurs variables : notamment la taille de la maison et l’efficience du poêle à bois. Il faut également noter que le prix du bois a augmenté cette année : à Yellowknife, une corde de bois se vend à présent autour de 500 $. « Mais lorsque nous payons 500 $ la corde, nous devons nous rappeler pourquoi son prix a augmenté, explique Linda Todd. Le coût de l’essence pour le véhicule et la tronçonneuse est plus élevé ; tout cela a augmenté. C’est une tâche très physique, donc c’est beaucoup de travail. »
Il y a quelques semaines, Médias ténois en a fait l’expérience. Nous avons demandé un permis au gouvernement et sommes allés ramasser du bois dans une zone déterminée par le ministère de l’Environnement, à environ 180 km de Yellowknife. Les règles sont clairement définies dans le document : nous sommes autorisés à couper un maximum de Asix cordes de bois pour usage personnel à un endroit précis entre les km X et Y de l’autoroute 3. On ne récolte que les arbres morts, les épinettes et les pins, le tout se limitant à une hauteur maximale de la souche de douze pouces. Seuls les arbres à plus de 60 mètres de la route peuvent être coupés.
Nous y sommes allés dans une camionnette munie d’une remorque. Nous estimons avoir dépensé environ 230 $ pour l’essence de la voiture et pour celle de la tronçonneuse. Ce chiffre n’inclut pas les autres dépenses. Il y a tout de même une part de risque, comme un bris de remorque ou les crevaisons lorsqu’on sort de la route goudronnée. C’est un exercice dur et physique demandant.
Cela dit, la coordinatrice de Arctic Energy Alliance souligne un point important pour ceux qui achètent du bois : « L’avantage de soutenir une industrie locale de récolte de bois, c’est que l’argent reste ici dans le Nord. »
Linda Todd l’explique un peu plus en détail : « Lorsque nous payons le mazout, il est vrai qu’une partie de l’argent sert à soutenir la personne qui livre le carburant et ses collègues, mais une grande partie de cette somme va sortir du territoire. L’argent ne circule pas dans la communauté. »
On ne récolte que les arbres morts, les épinettes et les pins. (Crédit photo : Cristiano Pereira)
L’importance d’un poêle à bois neuf
Ces dernières années, il y a eu plusieurs campagnes de sensibilisation sur l’importance de l’efficience des poêles à bois. « L’industrie a conçu des poêles à bois hautement efficients qui réduisent incroyablement les émissions », affirme Linda Todd.
Arctic Energy Alliance recommande, depuis longtemps, le remplacement des anciens poêles « des années 1980 ou 1990 » par des neufs. « Si vous achetez un nouveau poêle, explique la spécialiste de l’efficience énergétique, vous gagnez en efficience et vous réduisez vos émissions dans l’atmosphère. Si vous utilisez un vieux poêle, vous allez consommer beaucoup plus de bois et vous allez créer beaucoup de fumée. »
Les nouveaux poêles sur le marché portent une étiquette qui indique leur efficience. « Cela nous dit le pourcentage de la chaleur intégrée du bois qui sera convertie en chaleur », poursuit Linda Todd. Un nouveau poêle peut avoir une efficience autour des 80 %. Les vieux poêles auront peut-être une efficience de 40 % ou 50 %. « On va donc perdre la moitié de la chaleur possible. »
Le problème des vieux poêles ne se limite pas à leur incapacité à générer de la chaleur. Ils sont beaucoup plus polluants. Et cela arrive non seulement avec les poêles à bois, mais aussi avec une fournaise au mazout ou une chaudière au propane. « L’appareil que vous utilisez doit être aussi efficient que possible. C’est vraiment important. Si vous utilisez un appareil peu efficient, vous allez créer plus de pollution, quel que soit le combustible que vous utilisez. »
Linda Todd rappelle que Arctic Energy Alliance offre des rabais aux résidents du Nord qui achètent de nouveaux modèles d’appareils plus écoénergétiques. Cela comprend les poêles à bois, les fournaises au mazout, les fournaises au propane et de nombreux autres types d’appareils. Cela signifie qu’une personne peut aller acheter un nouveau poêle à bois chez plusieurs vendeurs des TNO et ensuite demander un rabais. La liste des vendeurs est longue et peut être consultée à en ligne. Un nouveau poêle à bois peut rester à la moitié du prix. « C’est un très bon rabais. Nous aimerions voir les gens utiliser de nouveaux poêles », commente-t-elle.
L’entretien des poêles à bois est quelque chose qui doit être pris très au sérieux. Linda Todd soutient qu’il y a trois choses importantes à faire : ramoner la cheminée, vérifier le joint et vérifier les briques. La fréquence de nettoyage de la cheminée dépend du bois qui brûle. « Si vous ne faites brûler que du bois sec et propre, vous devriez peut-être ramoner [la cheminée] une ou deux fois par an. Mais si vous brûlez du bois vert ou si vous n’utilisez pas correctement votre poêle, cela pourrait être tous les mois. »
Les systèmes aux granules de bois semble être de plus en plus utilisés. « Les granules sont un sous-produit des déchets de l’industrie du bois au Canada. C’est un autre moyen de chauffage viable », commente la spécialiste.
« C’est une sorte de préférence, conclut-elle. Beaucoup de gens dans le Nord aiment les poêles à bois, mais beaucoup d’autres préfèrent les poêles à granules parce que c’est moins salissant et qu’on peut facilement acheter des sacs de granules. »
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