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Budget territorial : six députés s’opposent

Après avoir présenté deux budgets adoptés à l’unanimité, la ministre Wawzonek fait face, ce printemps, aux critiques des députés représentant les petites collectivités. Il y a au moins quatorze ans qu’un budget territorial n’avait connu pareille opposition.


Thomas Ethier IJL – Réseau.presse – L’Aquilon


La première ministre des Territoires du Nord-Ouest, Caroline Cochrane, s’est dite offensée en chambre, le 31 mars, par les commentaires émis par les six députés qui ont voté contre l’adoption du Budget territorial des dépenses 2022-2023. (Capture d’écran – Assemblée législative des TNO)


Le tiers des députés de la 19e Assemblée législative ont fait front commun le 31 mars pour s’opposer au Budget 2022-2023 des TNO, qui prévoit des dépenses de 2,1 milliards $. Le document a finalement été adopté à onze voix contre six. Les opposants dénoncent une allocation des fonds qu’ils estiment orientés à l’avantage de Yellowknife et des grands centres. Absent de la session depuis février, le député de Nunakput, Jackie Jacobson, n’a pas voté.


L’Assemblée fait maintenant relâche pour un peu moins de deux mois, mais un climat tendu régnait en chambre en cette dernière journée de session. « Je dois dire que je suis offensée que l’on sous-entende que ce conseil ministériel se soucie davantage de la capitale territoriale que des petites collectivités, a déclaré la première ministre Caroline Cochrane, avant le vote. De mon point de vue, comme de celui de tous les [ministres], j’ai vu et vécu l’inverse. »


La veille, la ministre des Finances des TNO, Caroline Wawzonek, a annoncé des changements apportés en regard de commentaires émis par les députés au cours des dernières semaines. La Société d’habitation des TNO – rebaptisée Habitations TNO en mars – s’est ainsi vue allouer 4 millions $ supplémentaires par année pour ses programmes de logements. Un montant unique supplémentaire de 2,2 millions $ a été consacré aux refuges pour sans-abris.


Bien qu’applaudis par certains députés, ces amendements n’ont pas suffi à satisfaire les représentants des petites collectivités. Les députés de Hay River Sud, de Thebacha, de Dehcho, de Monfwi, et de Tu Nedhé-Wiilideh, appuyés par la députée de Great Slave, ont passé un message clair en votant contre le budget : les petites collectivités ont besoin d’un financement direct plus substantiel.

L’occasion d’accepter le désaccord

« La réalité, c’est que ce gouvernement est géré par des bureaucrates situés à Yellowknife qui, sans que ce soit de leur faute, pourraient ne pas saisir la vie, les ressources et les enjeux d’une petite collectivité, a avancé le député de Hay River Sud, Rocky Simpson. Ceci se traduit à travers des budgets, un appui et des programmes qui semblent hostiles et livrés dans l’incompréhension des réalités vécues dans les collectivités qui se trouvent à l’extérieur de Yellowknife. »


Ce dernier a évoqué les efforts et les fonds mobilisés à Yellowknife à l’automne 2021 pour l’établissement d’urgence d’un centre de jour pour sans-abris, alors qu’il réclamait un appui financier pour les sans-abris de Hay River. « Les collectivités se font dire d’utiliser leurs centres sportifs communautaires et autres établissements en guise de centres de jour », a-t-il déploré.


« Bien que j’aie l’intention de voter contre ce budget, je ne ressens aucune rancune ou animosité envers les ministres assis devant nous, car ils avaient, eux aussi, un travail à faire, a nuancé le député. Voilà une occasion d’accepter d’être en désaccord tout en soulignant les inégalités entre Yellowknife, les centres régionaux et les petites collectivités. »


Les collectivités négligées

Tous n’ont pas tempéré leurs propos comme l’a fait leur collègue. Selon la députée Frieda Martselos, le GTNO ferait preuve davantage d’écoute envers les parties prenantes de Yellowknife, par rapport à leurs homologues des collectivités. « Au cours des années que j’ai passées à titre de députée de cette Assemblée, jamais je n’ai vu un député de la capitale devoir plaider en faveur d’un financement dans cette chambre », a-t-elle avancé.


La députée de Monfwi, Jane-Weyallon Armstrong, a quant à elle remis en question l’allocation d’importantes parties des budgets territoriaux aux programmes voués à appuyer les collectivités, plutôt que de fiancer directement les collectivités. Offrant l’exemple des amendements apportés à la Loi sur l’éducation, la députée argüe que des fonds pour s’attaquer aux enjeux sociaux auraient été plus bénéfiques. « Un changement à la Loi sur l’éducation ne va pas régler la crise du logement », a-t-elle lancé.


« Par solidarité » avec ses collègues représentant les collectivités, selon ses mots, la députée de Great Slave, Katrina Nokleby – qui représente des électeurs de la capitale –, a voté contre le budget, après avoir dit douter de la volonté de changer les choses au sein du gouvernement. « J’ai observé notre gouvernement gaspiller de l’argent à gauche et à droite, et pourtant refuser une demande de 150 000 $ provenant d’une petite collectivité, tout en faisant valoir notre secteur public », a-t-elle indiqué.

Faire beaucoup avec peu d’argent

La ministre des Finances, Caroline Wawzonek, a répondu aux critiques, en soulignant d’entrée de jeu qu’une répartition du budget par habitant désavantagerait plusieurs collectivités à faible population. « Nous budgétisons de notre mieux, en fonction des besoins, et ce, dans chaque ministère, a-t-elle assuré. Nous opérons toujours dans un contexte de fonds limités, où nous devons nous assurer de fournir tous les programmes et services dans les 33 collectivités d’un très vaste territoire. »


Mme Wawzonek a également fait valoir que le travail centralisé au niveau des ministères sert l’ensemble des collectivités du territoire, en témoigne, selon elle, les réalisations du ministère de l’Exécutif et des Affaires autochtones. « C’est là que les négociations pour les revendications territoriales et ententes de gouvernements autonomes ont lieu », a souligné la ministre, en mentionnant également les discussions nationales entourant la déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.


Interpelé à titre de ministre des Affaires municipales et communautaires, Shane Thompson a fait état d’efforts conjoints avec l’Association des communautés des TNO pour réduire le manque à gagner dans les collectivités du territoire. « On nous demande sans cesse si nous cherchons des solutions créatives pour pallier le sous-financement des municipalités. Oui, nous tentons de trouver de nouvelles manières de faire entrer de l’argent aux TNO », a-t-il affirmé, en pointant du doigt la dette de 1,5 milliard $ des TNO.

Débat sur le racisme systémique

La confrontation entourant l’adoption du budget a laissé place à un second débat, initié par des propos de la députée d’Inuvik Twin Lakes, Lesa Semmler, et qui se sera conclu par des excuses de la première ministre. Mme Semmler a d’abord souligné que 98 % des enfants placés sous la protection des services à l’enfance et à la famille sont autochtones. « Si ces enfants étaient caucasiens, on parlerait d’une crise et tout le gouvernement se mobiliserait pour savoir comment cela s’est produit, s’est-elle exprimé. Mais comme cela nous vient de la rafle des années 60, ce n’est que la suite des choses. Il s’agit d’une crise. »


Cette intervention a déplu à la première ministre. « Je suis offensée. La députée a déclaré que, ces enfants étant autochtones, cela n’est pas important pour ce gouvernement […], et sous-entend ainsi des motifs cachés ou fautifs. En fait, cette déclaration implique l’ensemble du conseil ministériel et je crois que cela est irrespectueux pour chacun d’entre nous », a déclaré Mme Cochrane.


La députée a offert ses excuses, mais précise qu’elle parlait d’un enjeu historique qui n’a pas changé depuis l’époque des pensionnats. « Je ne blâme personne dans cette chambre ni ne les tiens responsables de cette situation. Il s’agit d’une crise et nous devons tous travailler ensemble. »


Pour avoir repris les propos de sa collègue, le député de Yellowknife Nord, Rylund Johnson, s’est également vu demander des excuses. « Si tous ces enfants étaient blancs, il y aurait une approche pangouvernementale. Il est tout à fait insensé de penser que ce n’est pas le cas. C’est ainsi que fonctionne le racisme systémique », avait déclaré le député.


Ce dernier a refusé de retirer ses propos. Trois autres députés ont par la suite pris la défense de Mme Semmler. La première ministre a finalement retiré son appel au règlement. « À entendre les membres, peut-être ai-je mal interprété les propos de la députée », a-t-elle concédé, avant de présenter ses excuses.

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